Peu après notre arrivée sur l’île du Sud, le parc national d’Abel Tasman, longeant la côte, nous a fait de l’œil. Mais comme ses sentiers sont assez convoités des randonneurs, l’accès aux terrains de camping nécessite une réservation. Alors, après un bref échange de regard complice, on a silencieusement convenu de nous aventurer « incognito » dans le parc et d’y faire du camping sauvage ;). Après tout, c’est bien plus excitant !
Tout au long du premier jour de marche, on appréhendait un peu le moment où il nous faudrait passer à l’action. On essayait de se faire discrets lorsqu’on croisait des rangers, feignant d’être en pleine discussion, et prenant un air parfaitement irréprochable (du genre de ceux qui, justement, sont des plus suspects !!).
Et puis le soir arrive… Le soleil disparaît peu à peu derrière les montagnes, et les promeneurs se raréfient. Nous sommes suffisamment éloignés des huttes où les rangers veillent au grain. Parfait !
L’heure est venue … D’un coup, on bifurque brusquement, quittant le sentier et nous enfonçant dans la forêt. Chaque pas nous dérobe un peu plus à notre monde familier. Les marcheurs de la journée s’en sont retournés à leurs chaumières et consultent probablement leurs photos autour de la table, les pieds engourdis trempant dans une bassine d’eau fraîche.
Quant à nous, plongés dans un milieu presque hostile, dans lequel nous perdons nos repères habituels, nous frémissons au moindre son, veillant à ne surtout pas signaler notre présence aux rangers du parc, comme un animal se cache pour échapper à son bourreau.
Dans la forêt, nos pas déchirent le silence et on s’arrête régulièrement, guettant le plus petit signe d’une présence humaine qui se serait attardée sur les sentiers et pourrait témoigner de notre délit. Notre petite escapade étant passible de 200 dollars d’amende et d’un rude coup de pied au cul, autant dire qu’on avait tout intérêt à rester discrets !!
Très vite les ombres s’obscurcissent, tandis que le monde sauvage s’éveille.
Sitôt le ciel éteint et les étoiles scintillantes, on entend le hululement des chouettes. Intriguée, l’une d’elle vient observer les deux insolites créatures qui s’affairent dans la forêt avec une nervosité cocasse. La présence de ces nouveaux énergumènes suscite la curiosité des petits êtres qui émergent de leur sommeil : on entend des bruissements dans les herbes, tout près de nous, et un peu plus loin le craquement des feuilles asséchées par le soleil. Deux Wekas s’approchent doucement de nos sacs, espérant y trouver quelque festin inhabituel. Nous étions les invités d’un rassemblement secret, à la lueur de la lune.
Au total, on s’est promenés pendant quatre jours entre mer et montagne. Après ce petit séjour, la douche (oh mon dieu, la douche…), le retour au van et la dégustation de crêpes (eh oui, ils ont du lait d'amande en NZ!) ont tôt fait de nous faire oublier les 120 kilomètres de marche. Nous avons retrouvé des amis amarrés à proximité, avec qui nous avons passé une très joyeuse soirée.
On vous embrasse bien fort.
PS : Si je suis toujours à la recherche de Pocahontas, j’ai déjà au moins croisé Grand-Mère feuillage !
